• Le diabolique Monsanto ...

    Début juillet, le rapporteur public du Conseil d’État nous en avait déjà raconté une bien bonne : d’après lui, le moratoire sur le maïs transgénique Mon810, de la firme Monsanto, devait recevoir son autorisation d’exploitation en France. Dans la mesure où les paysans le sèmeraient assez loin des maïs traditionnels et des ruches, il n’existerait aucun risque de contamination des semences ordinaires par les OGM. « Assez loin » des champs et des abeilles : on comprend mal ce que cela signifie quand on habite la campagne. Les pollens sont emportés sur des kilomètres par le vent ou les insectes butineurs.

    Début août, le Conseil d’État récidive et s’améliore dans l’ordre de l’absurde. La plus haute juridiction administrative française réclame que soit levé le moratoire qui, dans notre pays, frappe le Mon810 depuis plusieurs années. Tel qu’il est rédigé, le motif des super-juges est plutôt drôle ; à moins qu’il ne fasse grimacer. Il en réfère à la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne, selon laquelle « une telle mesure ne peut être prise par un État membre qu’en cas d’urgence et en présence d’une situation susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l’environnement ». Évidemment, si vous mangez du maïs Mon810 au petit déjeuner, ou si vous en faites avaler par les vaches dont vous consommez ensuite le lait et les produits dérivés, vous ne tombez pas raide mort comme dans Arsenic et vieilles dentelles. Si vous fumez une cigarette ou que vous inhalez de l’amiante dans votre escalier, non plus… Toute la question est celle de l’accumulation de petites doses de poison dans l’organisme, et de la plus ou moins grande résistance de chaque individu à la contamination.

    En matière de toxicité des OGM, comme du tabac, de l’alcool, de l’amiante, des benzopyrènes ou des isotopes radioactifs, il n’est jamais simple de prouver le risque, et encore moins de le quantifier. Les seules études qui vaillent doivent consister en des expérimentations de longue durée, et qui portent sur un grand nombre de sujets de laboratoire. C’est exactement ce qu’a essayé de faire, voici quelques mois, le Professeur Gilles-Éric Séralini à propos de certains OGM Monsanto. Ce chercheur s’est fait descendre en vol par une artillerie d’actionnaires financièrement intéressés, de lobbyistes stipendiés et de journalistes qui n’y connaissent rien et appellent « obscurantisme » ce qui est droit de savoir. Le Professeur Séralini demandait qu’on change la règle et qu’on porte la durée d’expérimentation obligatoire à deux ans, alors qu’elle n’est que de six mois. Après six mois d’exposition, ses rats de laboratoire semblaient fringants ; après deux ans, ils étaient boursouflés de cancers…

    Gilles-Éric Séralini ne demandait pas qu’on croie ses conclusions : il réclamait seulement qu’on refasse ses expériences pour les vérifier. Pour les valider ou les invalider… Cette requête lui a été refusée. Elle nous a été refusée. D’où la référence actuelle du Conseil d’État à la jurisprudence européenne : le Mon810 ne met pas « directement en péril la santé humaine, la santé animale ou l’environnement ». Il n’existe aucune preuve de sa toxicité : pardi ! En refusant de chercher, on ne risque pas de trouver quoi que ce soit… La réalité est ailleurs que dans la propagande des riches, confortée par l’ignorance de quelques juges suprêmes. Hormis les actionnaires de Monsanto et des autres multinationales de l’agroalimentaire, l’humanité n’a aucun besoin d’OGM agricoles. L’agriculture se porte bien sans eux – et même bien mieux. Le discours des lobbyistes de la mutagenèse est tout enluminé d’éléments de langage sur la nécessité morale de lutter contre la faim dans le monde, de trouver des maïs ou des blés qui résistent à la sécheresse, de planter des riz qui supportent les eaux saumâtres, etc. Ce logos n’est destiné qu’aux citoyens crédules et aux politiciens qui acceptent la combine.

    Aucune firme ne désire nourrir le Tiers Monde. Le moteur de Monsanto et de ses semblables n’est ni l’humanisme, ni la charité. C’est le fric. La rentabilité rapide. Et, par-dessus tout, la volonté de dominer le marché mondial des semences, des engrais, des pesticides et des produits alimentaires. Ah ! Tenir dans ses mains crochues la totalité de l’agriculture de la planète ! Quel rêve de puissance pour n’importe quel dictateur ! Quelle insurpassable image du pouvoir absolu !

    yves-paccalet.fr

    Altermonde-sans-frontières


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